L’assurance comme source de développement et de stabilité

L’assurance est une source de développement humain.

Sur le plan social d’abord, parce qu’elle réalise concrètement un certain idéal de solidarité. L’assurance repose en effet sur la technique de la mutualisation des risques. Seule la collectivité des assurés supporte le coût des sinistres et non chacun pris individuellement. Tous participent néanmoins à la vie économique de la mutualité en versant à l’assureur une prime qui est la juste contrepartie de la couverture d’assurance dont ils bénéficient. Ce procédé fait naître une forme de cohésion sociale. L’implantation réussie de l’assurance dans un Etat permet à ce dernier de bénéficier d’un certain développement social. Un véritable cercle vertueux se met en place : l’assurance favorise le développement, lequel est à l’origine d’une hausse de la demande d’assurance.

L’assurance contribue en outre à la recherche et à l’innovation, chacune source de progrès. En préservant les assurés des conséquences de certains événements dommageables, l’assurance encourage la prise de risque tout en garantissant une certaine sécurité financière. Les assurés doivent en principe souffrir le moins possible des sinistres que leur assurance couvre. Celle-ci doit les rétablir in statu quo ante[1], pour reprendre une locution latine célèbre et particulièrement bien adaptée à l’assurance. Il s’agit donc d’assurer une certaine stabilité. Le président de la République française George Pompidou[2] parlait de l’assurance en ces termes : « L’homme moderne est attaché à sa voiture, et si on la détruit, il ennuyé. Il n’est qu’ennuyé parce qu’il y a l’assurance… il serait malheureux s’il n’y avait pas d’assurances ». Les assurés échappent ainsi aux conséquences désastreuses des sinistres, en particulier sur le plan financier.

Cette stabilité financière permet aux assurés d’investir davantage dans certains fonds

Cette stabilité financière permet aux assurés d’investir davantage dans certains fonds et de participer au développement de l’économie, y compris par le biais de l’assurance. L’assurance-vie l’illustre parfaitement. Il s’agit pour beaucoup d’une méthode d’épargne qui permet de se constituer un complément de revenu ou de retraite. Dans les contrats en unités de compte notamment, cette épargne est principalement investie dans des obligations d’Etat, des valeurs mobilières, des fonds d’action ou des fonds obligataires, en sorte que l’assurance participe au financement de l’économie. Les assurés peuvent également utiliser leurs assurances comme moyen de crédit, afin de renforcer les différentes garanties qu’ils présentent à leurs créanciers. C’est ainsi le cas lorsqu’est souscrite une assurance-vie dont le capital égale le montant d’un prêt immobilier, ou encore lorsqu’est souscrite une assurance de dommages pour garantir un bien immobilier hypothéqué. L’assurance peut donc tout à la fois se présenter comme un investissement, un moyen de crédit ou une épargne – elle peut être les trois à la fois : tel est le cas pour les contrats d’assurance-vie en unités de compte dont la souscription est encouragée à raison par nombre d’Etats.

Une étude menée en 2014 par Swiss Re Economic Research & Consulting à partir de données collectées dans plus de 140 pays a démontré qu’il y avait une corrélation entre le développement de l’assurance et le développement économique d’un Etat. Cette corrélation est plus prononcée en ce qui concerne les pays en voie de développement. Moins une économie est avancée, moins l’assurance s’y développe. A rebours, plus une économie est développée, plus l’assurance y atteint un seuil. Les pays émergents sont donc ceux qui profitent le plus de l’impact positif de l’assurance sur l’économie. Cela étant, l’assurance peine à s’épanouir dans un environnement instable.

Tel est sans doute le problème que rencontre actuellement le continent Africain.

Celui-ci représente en effet plus de 15% de la population mondiale, mais la part globale des primes d’assurance (vie et non-vie) n’y excède pas 2%. Cette situation est paradoxale car l’Afrique connaît depuis le début des années 2000 une croissance annuelle constante de près de 4% (source : CNUCED, 2014). Certes, la croissance économique n’est pas également répartie entre les 54 pays du continent et l’assurance est plus ou moins bien établie en fonction des régions (il y a par exemple de très fortes disparités entre l’Afrique du Sud et les pays de la zone CIMA). L’Afrique présente cependant de très nombreux atouts pour l’implantation de l’assurance : dynamisme économique incontestable, évolution démographique positive, émergence de plus en plus affirmée d’une classe moyenne, régulateurs économiques efficaces, développement des modes et réseaux de distribution de l’assurance… Plusieurs raisons peuvent expliquer cette situation. En Afrique subsaharienne, près de 40% de la population vit avec moins de deux dollars par jour (source : Banque Mondiale, 2013). Les produits d’assurances sont encore, dans bien des cas, considérés comme des produits de luxe inaccessibles. S’ajoutent à cela des associations locales traditionnelles qui font fonction d’assurance et empêchent l’implantation des assureurs, des pratiques religieuses qui interdisent l’assurance, mais aussi des problèmes de corruption et d’inconstance politiques. En effet, bien qu’elle soit elle-même source de stabilité, l’assurance ne peut se développer dans un environnement instable. Il faut saluer à ce titre l’effort de codification qu’a fait la Conférence interafricaine des marchés d’assurance. Le Code CIMA, en partie issu du Code des assurances français, a eu en effet le mérite d’instaurer un cadre juridique très stable, offrant ainsi à l’assurance des conditions de développement optimales en Afrique subsaharienne. En effet, la stabilité juridique opérée par l’adoption d’un ensemble de règles unifiées a largement contribué au développement de l’assurance. On peut conclure en affirmant que la stabilité économique et juridique favorise le développement de l’assurance, elle-même source de développement et de stabilité.


[1] Sauf quand la remise à la situation d’origine se heurte aux limites du contrat (franchises, plafonds, exclusions…).

[2] Georges Pompidou (1911-1974), président de 1969 à 1974.